Depuis quinze ans, j’ai un médium de prédilection, la photographie. Au fil des ans, cherchant à repenser et élargir ma pratique documentaire, je me suis ouverte à la création sonore, au film et à l’écriture, tout en articulant mon travail artistique à la recherche en sciences sociales. Ce dernier a été présenté dans des expositions et dans des livres. Il a parfois pris des formes plus vivantes (conférences, projections parlées).
Je m’intéresse à la photographie en tant qu’outil descriptif au service d’une représentation du réel, ou plutôt du monde social. Je pratique l’enquête de terrain que j’associe à une démarche réflexive empruntée aux anthropologues, convaincue de sa portée heuristique : j’analyse de manière systématique mes relations d’enquête et les interactions de prises de vue parce que cela me permet de comprendre davantage de choses sur les personnes que je photographie et sur leurs mondes. Enfin, je porte une attention particulière aux points de vue que les personnes ont sur leur situation et à leur « image de soi ».
J’ai abordé des sujets divers, mais tous traversés par la question des relations qu’entretiennent les personnes et les territoires. J’ai commencé par les jeunes en milieu scolaire (Au collège, Le Foyer), avant de m’intéresser au monde ouvrier en Roumanie (Mioveni), puis aux revendications d’indépendance d’un territoire de facto indépendant du Caucase (Abkhazie) ou encore à la ligne de démarcation qui coupa la France en deux pendant la Deuxième Guerre mondiale (Je ne suis pas mort. La famille va bien). Plus récemment, j'ai travaillé sur les changements majeurs en cours en agriculture (On voudrait pas se faire manger, lauréat du programme Mondes nouveaux du Ministère de la Culture et du Soutien à la photographie documentaire du Cnap). Pour ce projet, j’ai réalisé mon premier film (Comme une ferme, en grand, 58 minutes). On y suit des agriculteur.trices qui militent au syndicat des Jeunes Agriculteurs dans l'organisation d'une grande fête populaire. J’y filme des jeunes qui, tout en s’investissant dans la reprise des fermes de leurs parents, cherchent à se réunir et se divertir.
Je réalise actuellement une thèse de recherche-création à Paris 8 sous la direction d'Arno Gisinger, dans laquelle je questionne la place, le rôle et le pouvoir des images dans le processus de représentation des personnes vulnérables, à partir de trois terrains d'enquête : un premier dans un centre d'hébergement d'urgence, un second auprès de mal-logés en milieu rural, un troisième dans un hôpital psychiatrique.
Par ailleurs, j’enseigne la photographie documentaire à l’École normale supérieure à Paris et j'encadre des stages de terrain « photographie et sciences sociales » avec des équipes pluridisciplinaires (sociologue, anthropologue, géographe, éditeur photo) dirigées par Florence Weber.